La préservation d’un écosystème spécifique dépasse largement des enjeux de protection de la nature, même si, en soi, le respect de l’environnement et des biodiversités végétales et animales constitue une motivation suffisante. En périphérie de la ville d’Arlon, dans le sud du pays, c’est bel et bien deux conceptions du monde qui s’affrontent. La sablière de Schoppach est ainsi menacée par un processus de bétonisation et d’artificialisation des sols, alors que cette zone a été répertoriée comme “zone de grand intérêt biologique” par la Région Wallonne en raison des nombreuses espèces qui y ont trouvé refuge, dont l’hirondelle des rivages, le triton crêté, deux espèces de papillons menacées et plusieurs plantes protégées.
L’anéantissement de ce lieu n’en a pas moins été programmé afin de bâtir un zoning pour PME comprenant, ateliers, bureaux et parkings, depuis son rachat auprès de la commune par l’inter-communale IDELUX-AIVE. Les priorités opposées montrent bien qu’il ne peut plus y avoir de compromis possible avec les partisans de la croissance, en faveur d’une “zone de grand intérêt économique”, ou d’un développement prétendument durable. Car c’est d’abord le capitalisme qu’il convient d’éradiquer, ainsi que sa logique invasive de dévoration et d’accaparement. Comme on peut le lire dans la Motion de soutien adoptée au 61ème congrès de la Fédération anarchiste réuni à Rennes les 29, 30 et 31 mai 2004 (“Du développement à la décroissance”) :
“Si aucune société n’est écologiquement innocente, c’est-à-dire si le développement de l’humanité s’accompagne toujours d’une transformation du milieu, c’est bien la course au profit, à l’accumulation, avec la création continue de besoins artificiels, qui produit une accélération fulgurante de la dégradation des écosystèmes. Le préalable à la mise en œuvre de cette décroissance est donc la disparition du capitalisme.”
La démocratie représentative montre ici encore ses limites et révèle, à Arlon, comme en d’autres lieux, les arrangements entre les pouvoirs civils et les intérêts financiers. Les pétitions et interpellations locales n’ont reçu aucune suite (tout comme, rappelons-le, la consultation populaire en faveur de la sauvegarde du parc Léopold à Namur). Le processus soi-disant démocratique qui assure l’exercice du pouvoir aujourd’hui ne représente ni plus ni moins qu’un dispositif destiné à préserver les intérêts des classes dominantes, des nantis et des puissants. Reprenons les termes de la Motion de soutien adoptée au 61ème congrès de la Fédération anarchiste réuni à Rennes les 29, 30 et 31 mai 2004 :
“La deuxième condition [à la mise en oeuvre de la décroissance] est la suppression de l’État, dans la mesure où cette dynamique capitaliste ne s’accélère qu’avec la collaboration des différents gouvernements : multiples subventions, mise en place d’infrastructures, prise en charge par la puissance publique de la formation, de la recherche, des coûts environnementaux, des pertes financières, cadre juridique sur mesure.”
Face à ces diktats, c’est l’action directe qui laisse place aux tractations et négociations : une ZAD a pris place dans la forêt le 26 octobre 2019 pour une durée indéterminée. “Au travers de cette occupation, c’est la sauvegarde de la Sablière, mais également l’arrêt de l’artificialisation massive des sols et l’accaparement des territoires à des fins privées, en Belgique et dans le monde qui est en jeu”, affirment les compagnons et compagnonnes rassemblées à Schoppach en ce lieu désormais rebaptisé “la Zablière”.
Le groupe belge de la Fédération,anarchiste “Ici et maintenant” se joint donc à cette manifestation légitime de solidarité avec tous les autres lieux et luttes de territoire qui agissent contre la destruction des écosystèmes et qui articulent enjeux sociaux et écologiques.