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L’AVENIR – Édito : Place nette

16 mars 2021

Durant toute l’occupation de la Sablière jusqu’après l’expulsion des « terroristes » de la Zad par des unités spéciales le 15 mars dernier (armes braquées sur nos camarades), presque tous les articles du quotidien L’Avenir laissaient transparaître une position favorable aux autorités, quand ils ne dénigraient pas carrément notre combat.

Mais comme dans toutes choses, il y a des exceptions.  En voici une, et elle est de taille : l’édito paru le lendemain du raid policier, qui diverge clairement des articles du numéro spécial sur l’évacuation de la Zad où l’on se réjouit de celle-ci.  Nous n’allons pas ici nous attarder sur quelques formulations ou certaines appréciations par son auteur qui en agaceront plus d’un, car l’essentiel du message ne s’en trouve finalement que peu affecté.

PLACE NETTE

A ceux qui se demandent si le monde de demain sera autre que celui d’avant, le délogement des zadistes de la forêt d’Arlon, hier, aura apporté une tonne de réponse. Aussi négative que symbolique.

Une nuit a suffi pour balayer l’utopie d’une poignée d’activistes. Le site de la sablière de Schoppach sera rénové et sécurisé. Tout est dit. Place nette au projet de zoning porté par ldélux. Bureaux et parkings.

Les bois d’Arlon, ce n’est pas l’Amazonie. Et si l’endroit présente un « grand intérêt écologique », motivant que ces 30 petits hectares forestiers soient érigés en « zone à défendre », le chapitre marquera de peu d’encre l’encyclopédie de l’environnement détruit. L’enjeu économique n’a pas non plus l’ampleur du projet d’aéroport de Notre-Dame­des-Landes, abandonné en France. Un caillou autrement plus pointu que celui coincé, depuis plus d’un an, dans la godasse des édiles arlonais, avec ses « entraves méchantes » à la circulation sur l’E411 qui auraient justifié l’intervention policière.

Les zadistes n’ont pas l’aura folklorique du chef Raoni. Ni la rage destructrice des émeutiers de Liège. Quelque 150 policiers, blindé, bulldozer et drones, ont quand même été mobilisés pour déloger, sans heurts, neuf endormis. L’autorité a mis les moyens, profitant du faible nombre d’irréductibles restés sur ce site, planté de pauvres cabanes et d’illusoires dispositifs de défense.

Dans l’ancienne sablière livrée à l’anarchie, plantes et animaux sauvages avaient repris leurs droits. De vie, de mort, de liberté. Trop pour ne pas se la voir confisquée.
L’issue était écrite, annoncée.

C’est le moment qui surprend, au lendemain d’un week-end où des centaines de militants écologistes ont manifesté en toge, avocats de la cause climatique.
A l’échelle de la détresse planétaire, la sablière d’Arlon n’est qu’un pointillé de verdure. L’enjeu dépasse le sacrifice d’un coin d’oxygène.

La défiance des zadistes, leur désobéissance civile, irritait sans doute autant que l’entrave au développement économique d’une société que la crise du Covid n’a pas vaccinée de son appétit de croissance forcenée. Face aux doux rêveurs et aux contestataires, le « vieux monde « (comme l’appellent ses détracteurs) sait passer à l’action quand il s’agit de montrer qu’il reste maître à bord. Et quels sont ses intérêts, pas différents de ce qu’ils étaient avant la crise.